L'aménagement fluvial de Lestelle-de-Saint-Martory (Haute-Garonne, France)
- Par Fabien Langenegger
- Le 02/04/2015
- Dans Archéologie subaquatique
Billet écrit avec Anh Linh François.
L'étude de cet aménagement fait l'objet d'un Master 2 à l'université de Paris 1 d'Anh Linh François. Cette étudiante a participé à la formation d'archéologie subaquatique organisée au musée du Laténium en 2014 (Cours d'archéologie subaquatique au Laténium). A cette occasion, une collaboration a été décidée avec elle pour l'étude du matériel ligneux issu de cette structure exceptionnelle retrouvée au sud de la France.
Lestelle-de-Saint-Martory se trouve au bord de la Garonne, à 80 km en amont de Toulouse aux pieds des Pyrénées. La Garonne est un axe important pour le commerce des matières premières par voie d'eau. Des recherches systématiques, pour retrouver des vestiges archéologiques le long du fleuve, ont commencé essentiellement à partir de 2012 avec la création de l'Association de Recherches Archéologiques et Historiques du Cours supérieur de la Garonne et de ses Affluents. La découverte du "barrage" de Lestelle-de-Saint-Martory a été effectuée en 2013. Aucune carte ancienne ne mentionne cette construction massive bâtie dans un des ressauts les plus importants du fleuve dans cette région.
L'aménagement couvre une surface de 200m2 et concerne un tiers de la largeur du cours d'eau. Il comprend une succession de 9 caissons réalisés à l'aide de pieux, de longerons et de palplanches. Le tout était maintenu ensemble grâce à des assemblages de type tenon-mortaise ou solidarisé par des longs clous forgés en fer. Les éléments en bois sont exclusivement en chêne. Les caissons ont ensuite été remplis de galets formant ainsi une plateforme étendue. Une double rangée de pieux participe à l'aménagement d'une voie d'accès à la structure depuis la berge.
La datation de cet ouvrage fluvial est problématique. Un même type de "barrage" n'a pas été retrouvé ailleurs et des éléments de comparaison sont peu nombreux. En d'autres termes, les pièces retrouvées ne sont pas caractéristiques d'une période précise. Elles peuvent aussi bien être attribuées à la période romaine qu'au début de la période moderne.
Les pieux situés en aval sont les mieux préservés et ils conservent encore leur tenon particulièrement imposant. Des encoches verticales sont également visibles sur certains pieux. Un premier échantillonnage a été réalisé au mois de mars 2015 afin de mieux comprendre l'organisation interne de l'ouvrage et de déterminer si différentes phases de construction peuvent être mises en évidence. Les vestiges sont situés à une faible profondeur, mais le fort courant présent à cet endroit complique l'opération de sciage des éléments en chêne.
La fonction de cet aménagement n'est pas encore déterminée avec certitude. Deux hypothèses semblent plausibles. Une construction de type "pertuis" est envisageable. Elle permettrait de concentrer le débit d'eau dans une seule partie de la rivière afin de permettre le franchissement des rapides. Mais le soin apporté à cette construction et la large voie d'accès construite pour pouvoir atteindre la structure me feraient plutôt pencher pour la construction d'une plateforme destinée à recevoir des installations nécessitant un apport d'eau important et régulier. L'installation d'un "moulin" à cet endroit n'entraverait pas la navigation qui débute essentiellement plus en aval. Des pieux, observés mais non documentés, sont situés près de l'autre rive du fleuve. Un échantillonnage de ces bois pourrait indiquer une éventuelle contemporanéité avec ceux de la plateforme et leur appartenance à une seule et même structure. Les travaux d'Anh Linh François permettront certainement de résoudre cette énigme.
FIN
France archéologie subaquatique dendrochronologie