Etude des palafittes
Les sites littoraux présentent généralement un état de conservation rarement comparable en milieu terrestre qui permet d’obtenir de précieuses données sur la culture matérielle et sur l’aménagement de l’habitat. Sous l'eau, le bois, à l'abri des insectes et des bactéries se conserve très bien. Sa présence, en grande quantité, est une aubaine pour le dendrochronologue. Des expertises dendrochronologiques peuvent être ainsi menées sur la quasi totalité des sites immergés. Elles permettent de dater les villages lacustres retrouvés en grand nombre au bord des lacs de l'arc alpin et de définir les plans des villages et leur évolution spatio-temporelle. L’analyse dendro-archéologique de l’ensemble de certains pilotis (champ de pieux) a permis la mise en place d’un cadre chronologique absolu. Au niveau de son plan au sol, l’histoire de chaque bâtiment peut être suivie avec précision plusieurs milliers d'années après leur construction.
Une restitution fiable du plan des maisons impose une étude attentive de toute la documentation du pilotis à disposition. Dans la mesure du possible, le prélèvement intégral des éléments de fondation est réalisé. Ce qui permet d’aborder une étude aussi bien techno-morphologiques sur le travail du bois, que socio-économique en identifiant certaines pratiques dans la gestion du bois d'architecture, la répartition spatiale des activités domestiques ou artisanales et la gestion de l'environnement immédiat. Une étude dendro-archéologique permet de retracer l'histoire de la croissance des villages construits depuis le début du 4e millénaire jusqu'à la fin du 9e siècle avant J.-C.
Les villages ont été construits selon un plan préalablement défini et marqué sur le terrain par des opérations "d'arpentage" qui ont pu être en partie identifiées pour la première fois sur un village de la baie de Bevaix au bord du lac de Neuchâtel. La précision de l’expertise chronométrique nous permet de suivre sur ce village, année après année, l’essor et le déclin du village, depuis l’abattage du premier arbre pendant l'hiver -1011/-1010, jusqu’au dernier pieu planté, un bois refendu provenant de la coupe d’un chêne âgé de 289 ans pendant l’hiver -952/-951.
L'appréciation temporelle de l’évolution architecturale et spatiale du village nous permet également de faire des comparaisons originales avec certains habitats voisins, datant de la même époque, et de mieux cerner les interactions entre le village lacustre et son environnement, grâce aux nombreuses fouilles et analyses paléoenvironnementales effectuées en milieu terrestre dans le terroir des stations lacustres. A l'âge du Bronze, les similitudes observées dans le développement des habitats contemporains soulignent la grande interdépendance entre les groupes humains.